DES YEUX, DES OREILLES

Est-ce qu'on peut voir avec les oreilles et entendre avec les yeux ?

Récits, souvenirs, descriptions… viendront apporter des réponses à chacun·e pour donner naissance à une cartographie sensible.

Atelier Mercredi 12 avril › Jeudi 25 mai 2023
Atelier Mercredi 12 avril › Jeudi 25 mai 2023

DES YEUX, DES OREILLES

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©Emilia Stéfani-Law

Intervenant·e·s : Didier Ruiz (artiste principal) et Thierry Vu Huu

La compagnie des hommes

La compagnie des Hommes, c’est depuis vingt ans une tentative de faire du théâtre d’une autre manière. Il ne s’agit pas de faire le malin, de faire « différent », mais plutôt d’avoir la sensation de suivre un chemin sans jamais s’en détourner. Faire théâtre, c’est-à-dire, ensemble, vivre des émotions qui nous transforment. Un avant et un après. Un moment de partage, de fragilité, c’est ça peut être faire théâtre.

L’espace a été ma première préoccupation quand j’ai arrêté d’être acteur. C’est drôle de dire ça, parce que je ne me suis pas arrêté du jour au lendemain comme on arrête de fumer. Je me suis éloigné du plateau en tant qu’acteur, comme aspiré par la place qui est la mienne et que j’adore. En face et dans l’ombre. Parce que je me suis aussi posé la question de pour qui et comment faire du théâtre, explorer d’autres espaces a été une priorité. Et les formes « parallèles » sont nées. L’Amour en toutes Lettres dans les bars, jardins… La série des Apéros polars dans les halls de théâtre, les granges, etc. Un besoin de donner rendez-vous ailleurs que dans le temple toujours un peu effrayant du Théâtre.

Ce chemin est aussi passé par les textes. Que dire aujourd’hui au théâtre qui résonne encore ? J’ai souvent évité les auteurs, les ai retrouvés. J’ai préféré parfois aux textes de théâtre, des lettres, des romans, de l’écriture de plateau.

Et puis ce chemin de vingt ans a rencontré la poésie et la vérité des non-acteurs, que j’appelle tendrement les « innocents » par opposition aux comédiens professionnels. Auteurs d’un jour ou d’une saison. Par le lien de confiance qui se tisse entre eux et moi, je les invite à se raconter. Dale recuerdos (je pense à vous), Une longue peine, TRANS (més enllà) et Que faut-il dire aux Hommes ? en sont des exemples. Ce qui semblait insensé il y a vingt ans est devenu postclassique. On l’enseigne à la fac, ici ou ailleurs.

Pendant vingt ans, j’ai appris à défendre mon théâtre, singulier, mais aussi politique, c’est-à-dire qui parle à l’instant aux hommes d’aujourd’hui. Je tente à chaque fois de faire entendre mon regard sur le monde. Et ma seule arme, mon seul porte-voix, c’est le théâtre.

Biographie de Didier Ruiz

Didier Ruiz crée La compagnie des Hommes en 1998 et commence un travail de mise en scène avec L’Amour en toutes Lettres, questions sur la sexualité à l’Abbé Viollet 1924-1943, spectacle pour trente comédiens, toujours au répertoire de la compagnie vingt ans après sa création.

En 1999, le premier épisode de Dale recuerdos  (je pense à vous) voit le jour et réinventé trente-six fois dans plusieurs villes en France comme à l’étranger (Santiago du Chili en 2008, Moscou en 2009, Malabo en Guinée Equatoriale en 2013, Barcelone en 2017 et au Festival Grec de Barcelone en 2021, Cuba en 2022). Didier Ruiz poursuit son travail de création autour de deux axes. Il crée des spectacles avec des acteurs comme L’Apéro polar 1, 2 et 3 (trois feuilletons théâtraux d’après La petite écuyère a cafté de Jean-Bernard Pouy, D’amour et dope fraîche de Caryl Ferey et Sophie Couronne et Des serpents au paradis d'Alicia Gimenez Bartlett), Fumer de Josep Maria ou encore Polar Grenadine, premier spectacle jeune public d’après Un tueur à ma porte d'Irina Drozd.

Il s’intéresse aussi à ceux qu’il nomme des innocents (par opposition aux comédiens professionnels), porteurs de leur histoire et par là-même d’histoires collectives. En 2013, une commande de l’Odéon-Théâtre de l’Europe, donne naissance à 2013 comme possible, une création avec quatorze adolescents de 15 à 22 ans, portrait poétique, réaliste et sensible d’une jeunesse d’aujourd’hui. Suivront huit éditions et une déclinaison déambulatoire en série, Youth. En 2016, Une longue peine, projet qui réunit quatre hommes qui ont connu de longues années d’incarcération et la compagne de l’un d’eux, racontent l’enfermement. Il crée TRANS (més enllà) au Teatre Lliure à Barcelone, un spectacle qui donne la parole à celles et ceux enfermés dans un corps et une identité dans lequel ils ne se reconnaissent pas. Il poursuit son travail consacré à la parole des invisibles en créant Que faut-il dire aux Hommes ? avec des hommes et des femmes de foi qui poursuit sa tournée.

En 2020, il réunit une soixantaine d’expert.e.s passionné.e.s dans un joyeux Grand Bazar des Savoirs au Maif Social Club à Paris. Une quatrième édition voit le jour en mai 2022 avec La scène nationale de l’Essonne Agora-Desnos.

En novembre 2022 sera créé un deuxième opus jeune public, Céleste, ma planète adapté du roman éponyme de Timothée de Fombelle.

La mémoire, la trace, mais aussi le portrait et la collection, sont autant de repères qui bordent un chemin continu que Didier Ruiz explore sans relâche.

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